Zanshin, l’esprit vigilant

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Boxer qui garde

 

 

Zanshin signifie avoir l’esprit vigilant, être sur ses gardes. Oui, mais à quoi cela nous sert exactement ? Eh bien ! À ne pas se prendre les coins de tables avec notre orteil par exemple. Ah, je crois que j’ai capté votre attention !

Cet article s’inscrit dans une série de 5 articles qui traitent les 5 états d’esprit que cherchent tous les combattants. Ce sont shoshin (l’esprit du débutant), fudoshin (l’esprit immuable), zanshin (l’esprit persistant), mushin (l’esprit vide) et senshin (l’esprit éveillé/purifié). Si à la base ces termes ont une connotation religieuse fortement marquée, nous ne les utilisons pas dans ce sens. Il faut voir ces états d’esprit comme des étapes mentales qui ont pour but d’atteindre l’état de fluidité définit par Mihály Csíkszentmihály. Cet état permet d’utiliser nos compétences physiques et techniques de façon optimale.

Tout comme les autres états d’esprit, zanshin est un terme japonais que l’on peut aisément retrouver dans les arts martiaux et les sports de combat de toutes les origines.

 

 

Zanshin, qu’est-ce que c’est exactement ?

 

Zanshin signifie littéralement l’esprit persistant, mais pour que cela soit plus clair je préfère utiliser l’esprit vigilant. C’est le fait que l’esprit n’est jamais au repos, il cherche toujours d’où pourrait venir le danger.

Comme tous les états d’esprit que nous travaillons, zanshin doit se faire de manière inconsciente. Sinon il est trop lent à entrer en action.

 

La vigilance au combat

 

Lorsque vous combattez, que cela soit en MMA (mixed martial arts), kendo, judo ou toute autre discipline, vous êtes vigilants. Enfin, je l’espère pour vous.

Votre esprit cherche la faille dans la position de l’adversaire à chaque instant. Est-ce qu’il a levé sa garde trop haut ? Est-ce qu’il a du mal à respirer ? C’est cet esprit qui vous permet de trouver les failles et d’emporter la victoire.

 

Combat de MMA

 

Mais si vous veniez à devoir intellectualiser ces remarques cela serait beaucoup trop long. “Tiens il boxe en gaucher, je vais donc faire un changement de garde au milieu de mon premier enchaînement pour le déstabiliser”. Autant lui envoyer une lettre pour lui dire ce qui va lui arriver. Non cela doit-être fait de manière automatique, car cela a été étudié en entraînement.

 

Zanshin, un danger pour vous-même

 

Parfois, c’est aussi zanshin qui vous fait perdre. Mais si José, rappelle-toi quand tu t’es jeté à corps perdu dans la feinte et que tu as pris un KO. Lorsque le zanshin d’une personne est trop agressif, que la personne est prête à se jeter sur tout et n’importe quoi, alors la feinte devient facile.

C’est pour cela qu’il faut aussi prendre en compte les éventuels pièges de notre partenaire dans notre zanshin.

Dans le cas des arts martiaux, un zanshin trop “agressif” peut provoquer des problèmes plutôt que de les éviter. On vous regarde, vous pensez qu’il y a un problème, la tension monte. Alors que si votre zanshin était plus”doux” vous vous seriez mieux considéré.

Il est dit dans le Hagakure, que le samurai ne dégaine son sabre que s’il est prêt à mourir. Certains samurais scellaient leur sabre avec une corde ou un ruban lorsqu’ils se baladaient dans les rues. Car s’ils dégainaient, ils devaient combattre à mort. De cette façon ils créaient une distance avec la réaction première qu’ils avaient, le zanshin.

Je trouve que cette image reflète bien le danger du zanshin. Il doit être éveillé perpétuellement, mais il ne doit pas créer de la peur dans notre esprit.  

 

Être vigilant avant la confrontation

 

Homme qui cri en gros planZanshin s’applique aussi dans le cadre de la self-défense. Dans le cas d’une agression imminente, dans laquelle vous ne pouvez pas fuir, zanshin est nécessaire. C’est ce qui va vous permettre de savoir combien ils sont, où sont-ils, s’ils ont une arme, etc.

C’est zanshin qui peut vous permettre d’éviter le conflit, même dans cette situation. Vous remarquez une porte qui va vous permettre de fuir, vous remarquez une personne qui peut vous sortir de cette situation inconfortable.

 

C’est encore zanshin qui va vous permettre d’éviter de vous placer dans une situation dangereuse. Vous avez remarqué que ces 3 types étaient alcoolisés, vous allez changer de rame de métro. Être vigilant est un travail permanent, persistant.

Les astuces données dans l’article « Dépasser ses limites grâce aux sports de combat » devraient vous être utile pour mieux maîtriser votre zanshin !

Zanshin, ne pas relâcher son attention après un combat

 

La plus grosse erreur que font les débutants, et les super héros, c’est de relâcher leur attention à la fin d’un combat. Eh boum ! il y a l’ennemi qui se relève et qui vous plante.

 

Enfant en costume de superman de dos

 

C’est pour cela qu’on vous demande de regarder votre partenaire jusqu’au bout, tout en gardant une vision périphérique de ce qui se passe pour éviter qu’un de ses acolytes ne vous surprenne.

Après une agression, si vous avez réussi à vous en sortir, vous allez avoir les jambes qui tremblent. C’est tout à fait normal, c’est la chute après le pic d’adrénaline. Il arrive quand la vigilance se réduit. C’est pour cela que tant que vous n’êtes pas dans une situation sécurisée vous devez rester vigilant.

On le voit parfois en combat. Un des deux combattants est certain d’avoir mis l’autre KO, il relâche sa vigilance et se fait surprendre. C’est dommage de perdre son combat parce qu’on a relâché son zanshin une demi-seconde trop tôt.

 

 

Sans zanshin, on ne peut intervenir

 

Vous pouvez être le meilleur du monde, si vous n’êtes pas vigilant, vous êtes fragile. Vous devez rester sur vos gardes en permanence, et ne jamais vous relâcher. Enfin, ça, cela serait idéal.

 

Renard qui dort
Je ne suis pas certain qu’il utilise son zanshin.

 

Mais il faut au maximum garder sa vigilance éveillée, même lorsque vous vous baladez en amoureux, il ne faut pas que la vigilance soit moins importante.

J’ai instauré certains rituels pour rester vigilant selon les situations. Si vous souhaitez un article dessus, n’hésitez pas à m’en faire part !

 

Zanshin, c’est analyser une situation

 

Zanshin, c’est l’esprit qui va vous permettre d’analyser une situation et d’agir en conséquence. Lorsqu’il y a un peu de distance entre vous et le problème. Soit qu’il n’est pas immédiat, soit qu’il ne vous concerne pas. Zanshin vous permet d’anticiper les situations à problème ou de prendre la solution la plus adaptée.

 

Ampoule allumée devant un tableau de calcul de stratégie


Je dois traverser un quartier dangereux. Je sais que je suis fatigué et j’ai mon super ordinateur portable sur moi. En plus il est tard, et il y a peu de lumières. Je change d’itinéraire tout simplement. Je serai en retard, mais je serai en vie.

Un autre exemple, je vois une jeune femme se faire importuner par deux hommes. Je peux intervenir directement ou appeler la police selon la situation. Zanshin vous permet de prendre la réponse adéquate à la situation donnée, car vous aurez mesuré tout ce qui entre en compte avec vigilance. Cependant, dans une telle situation, la chose que nous vous conseillons de faire est de prévenir les secours immédiatement.

 

Une seconde peau qui peut vous sauver la vie

 

Suricate aux aguets

 

Zanshin, c’est un peu comme une seconde peau lorsque vous pratiquez depuis un moment. Lorsque vous arrivez à une intersection, vous n’allez pas vous mettre contre l’immeuble, mais au plus loin de façon à voir l’angle avant d’y être arrivé et éviter de vous faire surprendre.

 

J’ai remarqué un fait intéressant, certaines personnes prennent instinctivement des actions plus vigilantes après un certain temps de pratique. Pourtant, elles ne s’entraînent pas forcément à cela durant la pratique. Car le fait de s’entraîner intensément fait que nous savons quand et comment nous sommes vulnérables. Et notre zanshin agit instinctivement pour que nous restions le mieux protégés possible.

Un bon moyen de vous améliorer est de vous entraîner n’importe où et n’importe quand. Par exemple n’hésitez pas à entraîner votre condition physique à la plage avec notre article.

Je vous conseille de prendre des habitudes en arrivant dans les lieux publics, même lorsque ces lieux présentent peu de risques. Vous allez repérer les sorties de secours, importantes en cas de danger, et les toilettes qui sont presque aussi précieuses.

 

Zanshin, c’est être concentré

 

Zanshin, c’est aussi le fait d’être attentif à ce que vous êtes en train de faire. Si vous n’êtes pas concentré, vous n’arrivez à rien.

C’est zanshin qui évite que vous vous blessiez en ouvrant les huîtres du réveillon: vous faites attention à ce que vous faites et vous mettez un gant éventuellement.

La vigilance, c’est un peu comme le regard. Vous avez la vision centrale, c’est ce que vous êtes en train de faire. Lorsque vous faites chuter quelqu’un, vous êtes concentré dessus votre mouvement. Mais vous avez la vision périphérique, ce qui se passe autour de la vision centrale. Eh bien ! Zanshin c’est réussir à prendre en compte tous les autres groupes qui travaillent autour afin de gérer mon partenaire pour qu’il ne chute pas sur un ami !

SI je devais rapprocher Zanshin d’un élément, ça serait l’air. Vous devez être comme l’air, et être partout à la fois, sans que cela soit visible. Il ne faut pas être tendu, comme une bête aux aguets, mais plutôt comme un chien qui se repose et qui se met debout au moindre bruit suspect.

Vous souhaitez quelques pistes pour entraîner votre zanshin ? J’en ai quelques-unes sous la main, il vous suffit de nous le demander dans les commentaires !

Si vous avez trouvé cet article intéressant, n’hésitez pas à le partager, le commenter et à le liker, c’est ce qui nous aide le plus ! Si vous voulez en savoir plus sur les autres états d’esprit, je vous invite à voir les autres articles ! Sinon vous pouvez également lire l’article la préparation mentale dans les arts martiaux et les sports de combat.

A très vite !

Cet article est corrigé par Henri-Pierre Juguet. Nous le remercions pour son travail de qualité. Si vous aussi vous souhaitez un bon relecteur/correcteur, voici son adresse mail : 

hpj.correction.redaction@gmail.com

 

 

9 Commentaires

  1. Bel article.
    Bruno Bert
    Bruno Bert Bien 🙂
    Le zanshin devient naturel après un certain temps de pratique. Parfois aussi, après de mauvaises expériences cumulées : on sera plus souvent sur ses gardes, attentif. Après il ne faut pas confondre vigilance naturelle sans relâche avec paranoïa.
    <>
    = le Hagakure, c’est un peu comme le Bushido : « roman » nostalgique écrit dans les périodes finales des samouraï, par quelqu’un déjà éloigné en temps comme en « terrain » de ces samouraï, dont l’âge d’or n’est pas 17ème/20ème siècle (Hagakure et Bushido) mais 12ème/16ème siècle (notamment Sengoku Jidai 1470-1573).
    Le scellement du sabre avec la sageo (corde, ruban lié au fourreau) lorsqu’ils se baladaient dans les rues a été imposé un peu avant la période Edo (1600-1868) notamment à Edo (Tokyo) siège des Tokugawa et à Heian (Kyoto, capitale du Japon à cette époque). Avant cela le samouraï avait droit de vie ou de mort.
    s’ils dégainaient, ils devaient combattre, parce que c’était une provocation, cependant il ne faut pas oublier le iai-jutsu : dégainer et couper dans un même mouvement.
    De toute façon le katana est une arrivée tardive chez le samouraï, parce que dans sa plus grande période, les armures des champs de bataille ne permettaient pas les coupes.
    Le problème de l’histoire, c’est de nous montrer principalement que la fin de ces guerriers japonais, de manière plutôt romancée, et non pas la partie principale, le début de la féodalité nippone, assez décalée avec ce qu’on imagine, dans le fond (rôle, comportement, « éthique ») comme dans la forme (combat, statut, vie de tous les jours).

    • Bonjour Bruno et merci pour ce commentaire très intéressant et très juste.

      Effectivement, l’histoire nous rappelle ce qui nous intéresse. On a mis en avant l’usage du katana en oubliant celui de la lance et de l’arc qui étaient bien plus utilisés sur les champs de bataille.
      Pour le iaijutsu, il est vrai que l’on peut tuer en un instant (d’ailleurs d’un point de vue prise de décision et action de la mise à mort le katana est, parait-il l’arme la plus rapide grâce à cette technique). Ce que je voulais dire, c’est que le fait de sortir la lame du fourreau impliqué nécessairement la perte d’une vie, car il s’agit en effet d’une provocation.
      Malheureusement je ne connais que très peu de textes racontant l’entraînement des samurai du 12ème au 16ème, mais si vous connaissez une bibliographie, je suis preneur.

      La paranoïa n’est pas un esprit vigilant, car l’esprit est focaliser sur une chose (sa peur) et donc ne peut pas être libre et détaché pour prendre de bonnes décisions.

      Encore merci pour ce très bon commentaire,
      Marvin

  2. Salut,

    Je suis souvent extrêmement vigilant… peut être même un peu trop… et du coup je me demande si je ne confonds pas avec ma parano ….

    • Salut Xavier,

      C’est une question assez récurrente. C’est pas dur, si lorsque tu marches tu es tellement focalisé sur ta peur de te faire agresser que tu n’es pas capable de te rendre compte que ton téléphone sonne, c’est de la paranoïa.
      La paranoïa mobilise toutes tes capacités cognitives sur un point (tu fais des plans sans arrête en marchant par exemple : derrière ce mur il y a peut-être quelqu’un, etc.). Le zanshin quant à lui est quelque chose de fluide qui va se passer plus instinctivement.
      Le zanshin d’un niveau plus élevé, par exemple dans une zone à risque demande un peu plus de concentration et d’analyse des choses. Mais il faut rester capable de tenir une conversation par exemple.

      Je ne suis pas psychiatre, je donne mon avis de pratiquant d’Arts Martiaux tel que je perçois les choses. J’espère que cela va t’aider, et si tu veux que l’on creuse n’hésites pas !

  3. Hello,
    Très intéressant! Et en effet, tu as capté mon attention dès le début de ton article avec l’histoire de l’orteil et de la table (Aïe, il s’en souvient encore). Dorénavant : Zanshin ! Merci

    • Hey,

      Merci pour ce commentaire ! J’essaie de plus utiliser ce type d’image dans les articles plus théoriques pour que l’on comprenne l’intérêt de cette théorie dans notre quotidien !

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