Fuir un combat, quelque chose de lâche, l’impensable pour tout guerrier qui se respecte. Peut-être êtes-vous de ceux qui pensent que s’échapper ou reculer est quelque chose de honteux. Mais est-ce vraiment le cas ?
Est-ce qu’un combat peut-être perdu d’avance, est-ce qu’un affrontement peut avoir une issue connue ? Et surtout est-ce que ça doit nous empêcher de lutter ?
Dans les arts martiaux traditionnels on prend régulièrement la nature en exemple, pourtant dans celle-ci il existe de nombreuses situations où la proie, se sachant perdue, lutte avec encore plus de hargne et survit. Vous avez sûrement déjà croisé des vidéos de gnous faisant fuir un félin ou d’un batracien échappant à un serpent. Cependant dans la majorité des cas, ils tentent de fuir. Qu’en est-il pour l’homme ?
Qu’est-ce qu’un combat ?
Il y a quelque temps nous avons partagé sur les réseaux sociaux une citation d’André Cognard issue de sa collaboration à l’ebook 3 conseils pour faire évoluer votre pratique (en libre téléchargement ici). Cette citation fait référence au fait de ne pas se lancer dans un combat perdu d’avance, un combat dont l’issue est déjà connue. Ici il parle du passé de quelque chose qui ne peut être changé, pourtant il y a eu beaucoup de réactions sur ce post. C’est d’ailleurs qui m’a donné envie d’écrire cet article.
« Le passé ne peut pas être changé. Un budoka ne s’engage jamais dans un combat perdu d’avance. »
ANDRÉ COGNARD, EXPERT EN AÏKIDO “TROIS CONSEILS POUR AMÉLIORER VOTRE PRATIQUE, PAR 15 EXPERTS” EBOOK GRATUIT ET TÉLÉCHARGEABLE GRATUITEMENT ICI
Je pense que le mot “combat” entraîne des différences de compréhension selon la pratique et la philosophie de chacun.
En effet certains ont pensé à une maladie incurable, d’autres un combat de survie ou encore un affrontement lors d’une compétition ou d’un entraînement. Le terme combat peut regrouper toutes ces idées, et avoir du sens dans cette citation. Je pense que chacun peut appréhender ce mot comme il l’entend, cependant je voudrais donner ici ma perception de la chose.
Nous faisons le choix d’éviter le combat militaire, car il nous semble sortir du cadre de cet article.
Fuir un combat d’entraînement ?
Pour moi un combat d’entraînement n’est pas réellement un combat mais plutôt un exercice appliqué d’une leçon, l’enjeu n’est pas de gagner mais de faire de son mieux pour se dépasser.
Il n’y a pas vraiment de vainqueur, seulement des personnes qui tentent de progresser ensemble, il s’agit alors de partenaire et non pas d’adversaire. D’ailleurs une phrase que j’entends souvent en Ju-jutsu Brésilien est “avec qui tu as tourné” et non pas “contre qui tu as tourné”. On pratique ensemble et non contre.
Il n’y a donc aucune raison de fuir un combat contre quelqu’un de plus expérimenté ou plus impressionnant physiquement. D’ailleurs, si cette personne ne cherche pas à gagner mais à progresser, vous devriez tous les deux apprendre de cette expérience.
Dans mon ancien club de JJB il y avait une femme menue mais très studieuse j’adorais m’entraîner avec elle. Je ne cherchais pas à passer mes techniques en force et j’évitais au maximum de bloquer les mouvements par la force (même si parfois j’avais de mauvais automatismes). J’ai beaucoup appris de nos exercices et je sais qu’elle a également apprécié malgré la différence de gabarit.
Compétition : faut-il fuir un combat perdu d’avance ?
Toujours dans le cadre de cette citation je pense que le combat de compétition n’a pas sa place car il ne peut être perdu d’avance c’est d’ailleurs pour cela que la compétition existe. Vous pourriez m’opposer que tomber face à un champion du monde lors de votre compétition risque de vous faire éliminer rapidement et, selon votre niveau, cela est probablement vrai.
Mais les compétitions comportent des règles, il est toujours possible d’essayer de remporter la victoire. Effectivement vous aurez moins de chance que si vous tombiez sur quelqu’un qui a moins d’expérience ou de technique ou un physique moins puissant.S’arrêter à son palmarès ou même à son niveau serait alors un signe de défaite.
Et, si vous êtes persuadé que vous n’avez aucune chance, pourquoi aller à la compétition ? Vous seriez sûrement mieux comme José en train de faire un barbecue non ? Si vous allez combattre, que vous mettez votre énergie, votre intégrité physique, votre temps dans la balance c’est sûrement que vous espérez remporter la victoire.
De plus on pourrait dire que la défaite n’en est pas vraiment une car comme le dit le proverbe « soit vous gagnez soit vous apprenez ».
Cette façon de voir un adversaire s’apprend et s’entraîne. C’est d’ailleurs un des gros points de la préparation mentale. Si vous en ressentez le besoin vous pouvez nous écrire un mail à contact@corps-et-esprit-martial.com pour avoir des conseils personnalisés.
Maladie incurable, est-ce un combat perdu d’avance ?
Pour ce qui est d’une maladie incurable , parfois mortelle, est-ce que l’on peut gagner ? Cela semble très difficile… sauf si l‘on change notre façon d’aborder le problème. La vraie victoire n’est pas de gagner face à la maladie mais de perdre le plus lentement possible, chaque nouveau moment de joie est une petite victoire.
Pour moi la vie est une succession de petits combats. Finalement nous perdons tous le combat face à la mort, personne n’y survivra ou du moins nous n’avons pas encore la solution (si vous avez une piste merci de la partager en commentaire sous l’article). Mais j’essaie de remporter un maximum de victoires dans mon laps de temps sur la terre, chaque moment, chaque instant où j’arrive à faire ce que j’ai vraiment envie de faire, à être heureux alors j’ai l’impression de gagner, comme si j’avais volé ces instants à un sort funeste.
C’est exactement de cette façon que j’ai amélioré ma situation en tant qu’asthmatique. Plus jeune, le moindre effort physique pouvait déclencher une crise d’asthme et je prenais chaque réussite d’exercices comme une petite victoire. En agissant ainsi je renforce mon mental mais aussi mon estime de moi-même et ma confiance en mes capacités. C’est par ce renforcement qu’aujourd’hui j’arrive à pratiquer régulièrement et intensément en ne faisant quasiment plus de crises d’asthme.
L’agression, un combat perdu d’avance ?
Pour ce qui est d’un combat qui pourrait être dangereux, voire mortel, car il serait sans règle et contraint comme lors d’une agression. Nous voyons-nous abandonner toute idée de lutter parce que la personne en face nous semble bien supérieure ou alors qu’il s’agit d’un groupe dangereux ou armé ? Devrions-nous abdiquer et laisser notre sort à des personnes mal intentionnées ? Il me semble évident que la réponse est non même si la règle des 3F (Fight, Fly or Freez) nous montre que beaucoup de personnes entrent en état de sidération.
On reviendra plus tard sur ce que l’on peut faire pour changer notre vision de l’évènement.
Il existe cependant des combats qu’on sait ne pas pouvoir gagner, comme changer le passé. Vous me direz que j’emploie le même exemple qu’André Cognard, ce qui est totalement vrai mais j’aurais tout aussi bien pu parler d’une bataille qui provoquerait des résultats stratégiques catastrophiques ou encore essayer de changer le cours d’une tempête qui se dirigerait vers votre logement.
Pour ce qui est de la tempête et du passé, nous voyons facilement en quoi nous sommes impuissants face aux forces de la nature ou à ses lois. Pour ce qui est de la bataille, il s’agit plutôt d’éviter au maximum de perdre son énergie dans quelque chose qui a peu de probabilité de nous apporter des résultats positifs (vous remarquez ici que je nuance mon propos pour marquer le fait que le résultat n’est pas certain). Ces combats même s’ils ne sont pas perdus d’avance ont un rapport bénéfice / risque bien trop grand.
Je ferai ici un parallèle avec la préparation physique dans laquelle de nombreux compétiteurs perdent énormément de poids juste avant la compétition, ce que l’on appelle le cutting. Cela augmente les chances de contre-performances mais cela peut également provoquer des dégâts sur leur santé voire la mort. D’ailleurs pour éviter ce problème vous pouvez consulter cet article sur le régime du boxeur pour avoir des astuces pour gérer votre poids. Pour mieux comprendre vos besoins nutritionnels vous pouvez regarder cet article.
Donc pour moi ces combats trop énergivores comparés à ce qu’ils peuvent rapporter doivent être évités si on peut le faire. Parfois il est impossible de s’esquiver et on n’a pas d’autre choix que de se lancer dans la bataille.
C’est maintenant de ces combats-là que nous allons parler. Mais avant d’aller plus loin on vous invite à partager cet article sur vos réseaux sociaux préférés ou encore par mail à vos amis.
Un combat perdu d’avance, est-ce si facile à mesurer ?
Fuir un combat ou risquer sa vie : être au clair avec soi-même
Je suis intimement convaincu d’une chose : si vous décidez de lutter pour votre survie, vous ne devez pas le faire dans la demi-mesure mais au contraire avec toute l’intensité dont vous êtes capable. Il faut donc effacer la moindre trace de doute qu’il pourrait y avoir en vous. Si vous avez peur des conséquences, vous ne pourrez pas vous défendre convenablement.
Mais comment faire ? Pour moi il y a de nombreuses choses que vous pouvez faire et cela fera l’objet d’un article complet ultérieurement (abonnez-vous au blog pour ne pas le manquer). Mais voici quelques pistes :
- faire un contrat avec vous-mêmes : s’il se passe ceci je suis prêt à..
- visualisez les situations
- entraînez-vous en situations intenses
- attention ceci est extrême : observer des blessures provoquées lors d’agressions
C’est vraiment une chose qui me marque chez les experts que j’ai pu rencontrer, ils semblent d’accord sur ce point : arriver à un certain stade (propre à chacun), les conséquences judiciaires doivent être laissées de côté le temps de faire en sorte de survivre.
C’est dans ce cadre que j’ai pu lire des phrases comme “pour mes proches je suis prêt à aller dans un combat perdu d’avance”. Lorsqu’on sait pourquoi on se met en danger on peut l’accepter plus facilement. C’est en étant au clair avec soi-même que l’on peut faire « ressortir la bête sauvage qui est en nous », comme le dit Robert Paturel. Avec des techniques de switch, vous pouvez alors faire basculer votre état d’esprit à un autre très rapidement.
Dans le cadre d’une maladie mortelle on pourrait également dire qu’il s’agit de profiter de la vie au maximum malgré la sentence finale qui nous attend. À l’opposé se trouvent des personnes qui restent bloquées sur l’annonce de la maladie (ce qui peut tout à fait se comprendre).
Combat et objectifs : déconstruisez la défaite
Si je vous demande aujourd’hui de faire en sorte de gagner 1 million d’euros d’ici un an sans quoi vous et vos proches seraient éliminés.. Même si c’est compliqué, vous allez faire en sorte d’y arriver. Comment ? Pas en gagnant la somme d’un coup, mais plutôt en cherchant des moyens d’accumuler la somme petit à petit (en trouvant des opportunités, en cherchant de bonnes affaires, etc,..). Autrement dit vous n’allez pas uniquement vous focaliser sur l’objectif de fin (gagner le millions) mais vous porterez plus d’attention sur les objectifs de moyen (comment y arriver).
Dans le cas d’une agression c’est quelque chose qui me semble important également. Se focaliser sur la survie risque de vous paralyser. Surtout si la menace vous semble invincible (trop imposante physiquement, armée, en groupe, etc.,..). Je pense que le plus important dans ces situations n’est pas de se focaliser sur le but de survivre mais plutôt sur les actions immédiates permettant la survie (mettre les doigts dans les yeux, crier, etc,..).
En se concentrant sur ces petits éléments à appliquer vous arriverez à entrer en action, et cela augmentera certainement vos chances de survie.
Bien entendu, je suis conscient qu’il s’agit ici uniquement de théorie, que je ne suis pas face à la mort grâce à la société relativement sécurisée dans laquelle j’évolue. Je ne fais qu’émettre des théories et des réflexions (issues de mes recherches et des échanges que j’ai pu avoir avec de nombreux experts) sur quelque chose que je souhaite ne jamais vivre. Mais c’est aussi un rôle de la préparation mentale. Nous avions déjà abordé ce thème dans notre article évoquant le lien entre le budo et la mort.
Dans le cadre du combat contre une maladie, il s’agit d’essayer de remporter de petites victoires comme continuer à sortir, voir ses amis etc.,.. même si vous n’en n’avez pas envie sur le moment.
Changer les critères de victoire
Vous êtes certain de perdre votre combat ? Changer ce que vous pensez être “gagner”. Il existe des moyens de changer votre vision des choses. Vous n’avez pas vaincu votre adversaire au dernier tournoi mais peut-être avez-vous gagné contre vous-même, car cette fois il ne vous a vaincu que d’un cheveu et vous avez réussi à lui faire subir votre enchaînement comme vous le souhaitiez.
Dans le cadre d’une agression il peut s’agir de protéger les personnes qui sont avec vous, de réussir à vous échapper ou n’importe quelle autre idée. La victoire n’est pas nécessairement vaincre physiquement son adversaire mais atteindre le but que vous vous étiez fixé. Si un combat vous semble perdu d’avance, c’est peut-être que vos critères de victoire ne sont pas les bons.
C’est en arrivant à la fin de cet article que je me rends compte que l’on a beaucoup aborder l’affrontement mais assez peu la fuite. Promis, on le fera dans un prochain article !
On espère que cet article vous aura plu ! N’hésitez pas à nous faire part de vos réflexions en commentaire, on les lit tous. Si vous avez des questions trop personnelles pour être postées en commentaire vous pouvez nous envoyer un mail, on vous répondra au plus vite.
À très vite.
Cet article est corrigé par Henri-Pierre Juguet. Nous le remercions pour son travail de qualité. Si vous aussi vous souhaitez un bon relecteur/correcteur, voici son adresse mail : hpj.correction.redaction@gmail.com
Crédits :
Image d’en-tête : Scream fais moi peur : le retour du cultissime tueur au couteau. Paramount Pictures